
Savez-vous qu’il existe une semaine consacrée aux proches aidants ? Habituellement, c’est la deuxième semaine de novembre. Aujourd’hui, j’aimerais vous partager un beau texte qui a été écrit sur le site de L’Appui (organisme venant en aide aux aidants).
Ton rendez-vous médical, Papa, à quelle heure déjà?
Certains entrent dans la proche aidance par choix, sans même se questionner. Pour d’autres, ces choix ne sont pas si évidents, et ils se retrouvent face à des dilemmes, surtout lorsque la situation s’étire dans le temps et que leur rôle s’intensifie.
Karine Cloutier, de l’équipe de l’Appui pour les proches aidants nous livre une réflexion personnelle sur la proche aidance, mais aussi sur ses contours et limites et sur le droit de réajuster, à tout moment, ses choix et ses décisions.
C’était en 2003. La mère de mon amie Claire avait commencé à être malade. Elle avait besoin d’aide, de soutien, de présence. Claire avait été là pour elle. À cette époque, ni Claire ni moi n’étions familières avec le terme « proche aidante ». Je ne savais pas précisément ce que cela signifiait. De son côté, Claire l’avait su plus rapidement qu’elle ne l’aurait souhaité.
Quand, à l’époque, Claire m’avait fait part de sa situation, je me rappelle avoir été frappée par ses propos. J’ai oublié les mots exacts qu’elle avait employés, mais en substance mon amie avait décidé de délimiter le soutien apporté à sa mère. Dès le départ. Par exemple, elle se donnait le droit de ne pas aller à tous ses rendez-vous. Je me souviens de ma réaction. J’avais été troublée par l’idée d’établir une démarcation dans une relation d’aide. À l’époque, je pensais que la seule réponse valable envers un parent vulnérable était un soutien inconditionnel. Ce parent nous avait élevés et avait été présent pour nous, malgré les possibles failles dans notre relation. À mes yeux, le simple fait qu’il soit notre parent justifiait un sacrifice. Il ne pouvait pas y avoir de délimitation.
Le temps a passé depuis. Je suis devenue mère, Claire a bâti une brillante carrière. Sa mère est décédée. Notre amitié est restée intacte. Je n’ai toujours pas été confrontée à une situation de proche aidance. Mais je comprends maintenant que tant qu’on n’a pas vécu cette expérience, il est difficile d’en saisir l’ampleur et délicat de poser des jugements.
Mes parents ont vieilli. La santé de mon père décline. Il évite d’en parler, tout comme moi d’ailleurs. Notre relation s’est effritée, nos rencontres sont rares. Je pense souvent à lui. Je l’appelle peu. La culpabilité est là. Je me juge. J’anticipe.
Je serai proche aidante. Dans deux ans, dans cinq, peut-être plus tard. Je serai toujours maman, encore professionnelle, amoureuse sans relâche, curieuse de la vie à toute heure.
- Alors, j’appellerai Claire.
- J’appellerai Claire, pour lui dire que la compassion et l’altruisme sont des valeurs importantes pour moi.
- J’appellerai Claire. Elle me parlera de sa maman. Elle me rappellera l’amour, les petites joies, les moments cocasses, les limites, la démarcation.
- J’appellerai Claire pour lui parler de la pression sociale, des jugements hâtifs, des attentes de la société, de ce que je crois devoir faire.
- J’appellerai Claire. Elle me dira que je peux accompagner mon père selon mes capacités, mes ressources et mes convictions. Que je peux tracer les contours de ma proche aidance.
- J’appellerai Claire pour lui dire que mon père a été présent et a influé sur ma vie, contribuant à forger mon identité. Je sens que je lui dois ça.
- J’appellerai Claire. Elle me dira qu’en tout temps, j’ai le droit de revoir mes choix, de réajuster mes décisions, de demander de l’aide pour moi-même.
- J’appellerai Claire pour lui dire mon sentiment de culpabilité. Pour qu’elle me rappelle que j’ai ma propre histoire, mon vécu, mes aspirations et que rien ne m’oblige à me sacrifier.
- J’appellerai Claire. Elle saura trouver les mots si elle voit que je mets à mal des pans de ma vie. Elle m’aidera à être bienveillante envers moi-même.
- J’appellerai Claire. Nous parlerons de liberté et de choix. De limites. De jugements. De contraintes sociales. De la société québécoise face à la vieillesse et à la maladie.
Puis, j’appellerai mon père. Ton rendez-vous médical, Papa, à quelle heure déjà?
Je m’appelle Karine Cloutier, je suis conseillère au développement régional à l’Appui pour les proches aidants. Un jour, je serai proche aidante.
Selon une étude menée par l’Institut de la statistique du Québec, datant de 2018: 34 % des adultes québécois·es sont proches aidant·es. L’enquête met en évidence l’augmentation de la proche aidance au Québec. En effet, elle identifie qu’un tiers des adultes du Québec sont des proches aidants. Au total, on compte donc 2,3 millions de Québécois qui accompagnent un de leurs proches en lui fournissant de l’aide ou des soins au moins 1h par semaine. L’augmentation peut s’expliquer notamment par le vieillissement de la population ou la hausse des maladies chroniques.
Qui sont les adultes proches aidants ?
Les proches aidant·es sont à 54 % des femmes, une surpondération par rapport à la population générale (les femmes représentent 51 % des adultes du Québec).
Concernant leur âge, les proches aidants entre 45 et 64 ans sont les plus nombreux (39%). Les 18-44 ans représentent 34% des aidants, tandis que 25 % ont plus de 65 ans. Enfin, ils travaillent à temps plein pour 49 % d’entre eux. Le rôle de proche aidant-e est en effet un rôle additionnel, qui s’ajoute à une vie déjà bien remplie.
Près des deux tiers des proches aidants s’occupent principalement d’un aîné. Les aînés accompagnés souffrent principalement d’une perte d’autonomie liée au vieillissement ou de troubles neurocognitifs tels que l’Alzheimer.
Un quart s’occupe d’un adulte entre 21 et 64 ans touché par un problème de santé mentale ou un cancer principalement. Quant aux proches aidants qui accompagnent un proche de moins de 21 ans, ils représentent 7% des proches aidants. 41 % des proches aidants s’occupent principalement d’un de leurs parents ou beaux-parents. On compte pratiquement autant de proches aidants qui s’occupent d’un proche sans lien de parenté (voisin, ami ou collègue) que de proches aidants soutenant leur conjoint.
Mon Jocelyn est tout pour moi. C’est un privilège de l’avoir à mes côtés. Sans lui, je n’aurais assurément pas la même qualité de vie. Je l’aime mon précieux.
Chantal Lanthier
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Je confirme : la tâche de proche aidant en est une de proche aimant. Je n’aurais pu faire autrement, même si à un moment j’étais épuisée, mon amour pour ma maman était plus fort que la fatigue. Je vous souhaite à toi, Chantal, et ton amoureux, Jocelyn, une belle année 2024, remplie de douceur, de joie et pleins de petits bonheurs au quotidien.
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Merci Nathalie. Même chose pour toi. Xxx
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C’est un texte très beau et nécessaire. Merci du partage. J’en profite pour vous souhaiter une heureuse et paisible année.
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Merci Marie-Luce
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Que l’année 2024 soit douce et sereine pour toi Chantal et pour ton Jocelyn. Et encore merci pour tes merveilleux partages. Nicole xxx
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Merci Nicole. Même chose pour toi xx
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