L’importance d’obtenir de l’aide

J’ai souvent parlé dans mes chroniques de l’importance d’offrir du répit à la personne qui s’occupe de moi. Il est essentiel que mon Jocelyn puisse s’offrir au moins une journée par semaine pendant laquelle il n’a pas à se soucier de moi. Il fait ce qu’il veut tout en me sachant en sécurité.

Un programme gouvernemental existe pour nous permettre d’embaucher une personne de notre choix (un membre de la famille ne résidant pas à la même adresse que nous ou autre) pour qu’elle puisse nous venir en aide. Ce programme qui s’appelle Chèque emploi-service, alloue à une personne en perte d’autonomie un certain nombre d’heures pendant lesquelles elle peut bénéficier de services d’aide à domicile. Il permet de choisir l’aide en fonction de nos propres besoins: tâches ménagères, préparation des repas ou encore assistance personnelle, etc. On doit communiquer avec la personne responsable de ce programme dans notre CLSC. C’est elle ou le travailleur social attribué à notre dossier qui fera l’évaluation de la personne en perte d’autonomie. Le nombre d’heures est attribué en fonction du niveau d’incapacité de la personne atteinte et non en fonction des besoins de l’aidant. Une fois le programme accepté par le CLSC et que l’argent est réservé, c’est à nous de définir l’horaire de la semaine selon nos besoins et contraintes. La personne choisie est payée environ 20$/heure aux deux semaines. Nous devons compléter un formulaire attestant des heures et l’expédier au bureau Chèque emploi-service via fax. Le montant des heures travaillées est déposé directement dans son compte bancaire de l’aidant.

J’ai remarqué que le nombre d’heures allouées dépend également du budget attribué à chaque CIUSSS (Centre intégré universitaire santé et services sociaux). À condition égale, il n’est pas normal parce qu’on réside en région de recevoir moins d’heures. C’est totalement inacceptable mais c’est ainsi que fonctionne notre beau système.

Nous faisons actuellement affaire avec Lyette (une perle) qui habite près chez nous. Elle est présente 25 heures/sem. Elle me coiffe, m’applique de la crème, fait la cuisine, me donne ma douche, fait la lessive et le ménage. Nous allons parfois magasiner ou en sortie. Il s’est installé entre Lyette et moi une grande confiance. Nos échanges nous nourrissent mutuellement. Nous rions facilement des situations cocasses qui surviennent très souvent.

Je dois toutefois avouer que je préfère grandement la présence de Jocelyn au-dessus de toutes les autres. Je ne comprends toujours pas les émotions qui m’habitent lorsque je vois arriver sa journée de répit. Il quitte habituellement de 11 heures à 20 heures. Le reste du temps, il est présent au condo. J’essaie vraiment d’interroger mes sentiments afin de mieux comprendre pourquoi ça me met dans cet état lorsqu’il s’absente. Est-ce l’insécurité, est-ce le fait de ne pas pouvoir parler, le manque de confiance, l’envie, la perte d’intimité, de voir une étrangère chez nous, sentiment abandon ou bien le fait de sortir de ma routine? Je continue à m’interroger sur mes émotions. J’avoue toutefois qu’il constitue ma sécurité. Dans mon état de grande vulnérabilité, il est mon roc. C’est peut-être aussi à cause de notre grande complicité que je ne veux pas qu’il s’éloigne. C’est si simple avec lui. Nous n’avons pas besoin de nous parler pour nous comprendre. Lorsque parfois j’ai besoin de lui, je trouve toujours étonnant de constater à quel point Jocelyn enchaîne ce ballet de gestes sans que nous échangions une parole. Me sortir du lit, m’habiller, m’installer dans mon fauteuil, etc. Une série de gestes précis pendant lesquels seuls nos yeux communiquent, guidés par une solide confiance.

Jocelyn se démène pour rendre mon quotidien harmonieux. Malgré que je faisp tout mon possible pour alléger ses tâches (femme de ménage aux 2 semaines, achats de mets cuisinés qu’il n’a qu’à réchauffer, je tiens encore les comptes et paye les factures), il me dit combien il a besoin de sa journée de répit. Nous avons eu de nombreuses discussions à cet égard. J’argumente que je le dérange peu dans la journée (parfois je ne dérange pas pendant 3 heures) tandis que lui me dit que sa journée de répit le libère de la charge mentale et émotive qui lui est imposée.

Je suis consciente que Jocelyn doit prendre soin de lui pour bien prendre soin de moi et c’est pourquoi je dois, moi aussi, contribuer à son mieux-être. Si je désire rester chez moi le plus longtemps possible, je dois faire des efforts pour déconstruire mes craintes et accepter l’aide extérieure. Par chance, Jocelyn et moi n’avons pas peur d’aborder le sujet. Nous finirons bien par répondre aux besoins de l’un comme de l’autre.

Accompagner une personne gravement malade veut dire vivre dans l’ombre de cette personne, qui reçoit beaucoup d’attention de la part du corps médical et des proches.  Cela exige une grande dose d’humilité. Cela constitue un travail colossal, mais en même temps, ça peut être très valorisant. Il s’agit probablement du plus grand geste d’amour qu’un être humain puisse faire pour un autre, même au coût d’un épuisement physique, émotif et mental. Il n’est pas donné à tous de devenir aidants naturels et pourtant… ils sont là lorsque les forces te manquent. Ils alimentent ton courage et s’échinent à maintenir ta fierté et à faire briller ton âme. Ils ont tout mon respect. Ils sont irremplaçables.

 

Chantal Lanthier

 

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4 réponses sur « L’importance d’obtenir de l’aide »

  1. Bonjour Chantal,

    Je ne sais pas si tu vas te rappeler de moi, je travaillais dans la voute au Leclerc et par la suite je suis devenu Agente de Correction et je suis partie pour un autre établissement dans la région de Québec.

    Je n’ai jamais eu la chance de te le dire mais si tu savais comment tu as été une source d’inspiration pour moi… je te regardais travailler et tu te donnais plus que ton 100%… toujours souriante.. toujours professionnelle … tu as été pour moi sans que tu le saches… une personne importante dans mon choix de carrière….

    Je suis tellement désolé pour toi mais je sais que tu es une personne très fort et je t’envoies plein d’onde positive…

    J’espère qu’un jour nos chemins se croisent et d’ici là j’aurai toujours une pensée pour toi et
    pour Jocelyn.

    Bonne soirée

    Lucie B.

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